D- La famille royale en adoration devant Aton

Akhenaton et Néfertiti sont seuls habilités à rendre le culte au soleil levant chaque matin, et se rendent en char au Grand Temple depuis leurs palais privés. La cérémonie consiste à consacrer une grande quantité d'offrandes qui s'entassent sur des autels en plein air. Ces offrandes sont essentiellement de deux types :

Des offrandes alimentaires en quantité importantes et dispersées sur des centaines d'autels. En effet, nous avons vu que l'au-delà amarnien se déroule sur le site d'Akhetaton, et il faut donc pourvoir les Baous des défunts. Ironiquement, c'est au moment où les dieux anthropo/zoo/morphes, susceptibles de manger les denrées offertes disparaissent au profit d'un globe, que les offrandes alimentaires prennent une importance particulière ().

Les rites d'offrande de lotus, quoique rarement signalés dans la littérature sont pourtant caractéristiques de la période (par exemple sur cette ). Nous avons vu qu'Akhénaton refuse un destin nocturne au soleil, qui n'accomplit donc plus un cercle autour de la création, mais un demi-cercle : comme le proclament les hymnes à Aton, lorsque le soleil se couche, la terre est plongée dans les ténèbres et tout ce qui s'y trouve est comme mort. D'où l'idée d'utiliser le lotus comme symbole de renaissance : il s'enfonce sous l'eau chaque soir et sort épanoui chaque matin, dans une perpétuelle renaissance.
Une scène également fréquente est l'offrande à Aton des cartouches contenant son propre nom ou celui du roi et de la reine.
Pendant ce temps, les prêtres et même le grand-prêtre d'Aton, sont prosternés devant le couple royal devenu la divinité tangible. Des musiciens accompagnent la célébration (nous reparlerons de la musique plus bas)

E- La famille royale dans l’intimité

Akhénaton encourage la représentation détaillée et animée de toutes les scènes de la vie quotidienne, y compris celles auxquelles il participe lui-même.
Les actes de la vie courante du couple royal (se laver, s'habiller, manger, boire…) sont ritualisés, puisque le roi et la reine ont pris la place des statues divines (qui sont proscrites, décrites comme des idoles de pierre sans valeur…).
Parfois sont représentés des gestes d'affection entre les membres de la famille royale, par exemple chez Houya, Akhénaton tient la main de Néfertiti () où Néfertiti est tendrement tournée vers son époux, leurs deux visages se frôlant pour un baiser, comme dans la tombe de Mahou. La signification de ces marques d'affection dépasse le côté affectif et il faut aussi y voir la volonté politique de montrer la fécondité du couple royal et son attention pour sa progéniture.

Le repas amarnien

Ce thème se trouve dans les tombes de Meryrê, de Houya, d'Ahmès et de Pentou, toujours dans la première salle. Jusqu'au règne d'Akhénaton, le défunt, parfois avec son épouse, est représenté de façon rigide et statique devant une table d'offrandes, mais il ne consomme jamais.
Durant l'époque amarnienne, tout change : sur les parois des tombes, on montre le roi - et parfois les membres de la famille royale - attablé ou debout, en train de manger et de boire. Le caractère apparemment trivial de ces scènes ne doit pas tromper : Akhénaton qui mange, c'est Akhénaton qui fait offrande à Aton !
Quant au défunt, s'il participe à ces scènes c'est en tant que serviteur, représenté sur une échelle très réduite par rapport aux membres de la famille royale. Ainsi, dans la tombe de Houya on trouve deux représentations du couple royal en train de manger et boire en compagnie de la reine mère Tiy ; Houya est représenté minuscule aux pieds d'Akhénaton (voir ci-contre).

La dame Moutnedjemet

Mutnedjemet (red cross) and her two lady companions (green crosses) Moutnedjemet (croix rouge) et ses deux dames de compagnie (croix vertes)

Une princesse qui se nomme "Beneretmout" ou "Nedjemetmout" ou "Moutnedjemet" est représentée dans les tombes de Ay, Parennefer, Panehesy, Toutou et May. Il s'agit de la sœur de la reine néfertiti, vraisemblablement sa cadette. Elle bénéficie dans ces chapelles d'une place tout à fait privilégiée, dont témoignent les marques de respect qui l'entourent. Elle apparaît toujours dans la suite du roi, près de sa sœur la reine et de ses nièces. Elle est suivie de flabellifères (hommes et femmes) et de ses deux dames de compagnie, qui sont deux naines du nom de "Hemetnisouterneheh" et "Moutefparê", où curieusement le "ef" (= sa) se rapporte à un homme.
Il n'y a pas de preuve formelle, mais un faisceau convergent de données s'accorde pour voir en cette jeune personne la Moutnedjemet qui sera la seconde épouse du futur pharaon Horemheb.

F- Les déplacements en char du couple royal

1)- Sorties quotidiennes

Lorsqu'ils quittent leur résidence pour se rendre aux temples ou dans un autre palais et en reviennent, le roi et la reine parcourent en char la voie royale, longue de plusieurs kilomètres. Ils sont escortés de flabellifères, de porte-enseignes, de serviteurs… mais aussi de policiers et de militaires (). Ce trajet matinal nord-sud, considéré comme la transposition terrestre du périple est-ouest d'Aton dans le ciel, a été sacralisé et fait partie intégrante du culte à Amarna. On a pu montrer (Gabolde) que seuls sont considérés comme sacrés les endroits où Akhénaton et sa famille sont représentés : les palais, les temples et les voies reliant les uns aux autres.

Ces déplacements en char permettent aussi de mettre en avant un symbole cher au souverain : le mouvement. Akhénaton se déplace sur son char comme Aton dans le ciel et apporte le souffle de vie, comme le montrent les rubans flottant derrière lui. Dans la conception atoniste, le monde n'a rien de statique, il est en transformation perpétuelle ; ce devenir constant est alimenté par l'Aton vivant.

2)- Les jours de fête

Les sorties cérémonielles du couple royal remplacent la sortie des statues divines lors des fêtes traditionnelles ; par exemple il existe des analogies avec la fête d'Opet à Thèbes au cours de laquelle la statue divine d'Amon parcourt elle aussi un trajet nord-sud (temple de Karnak → temple de Louxor).
La population acclame son souverain comme elle acclame la statue d'un dieu dans sa barque cérémonielle : "il était le dieu qui sortait en procession, qui réalisait des signes et des merveilles et qui intervenait dans la destinée de l'individu, détenant la vie et la mort dans ses mains." (Jan Assmann)
Notons au passage la disparition de toute référence à des activités nautiques dans les tombes amarniennes, comme d'ailleurs dans la nouvelle théologie.

3)- Le char et le cheval

Devenu mode de déplacement de la haute société et marqueur d'appartenance à celle-ci, le char est partout dans les tombes amarniennes, associé au roi et à sa famille, mais aussi aux particuliers. Symbole solaire, il peut être doré, voire plaqué de feuilles d'or. Il joue un rôle important tout au long de la XVIIIe dynastie dans le processus de solarisation du souverain et il est donc logique que ce soit à l'époque amarnienne qu'il soit le plus représenté.
Le char est un véritable trône mobile et il en partage l'iconographie. On note l'importance donnée aux deux chevaux (qui semblent souvent n'en faire qu'un) attelés au char royal, ainsi qu'à leur harnachement très détaillé, embelli par une parure de hautes plumes sur la tête (). Les chevaux sont représentés cabrés afin d'exprimer l'énergie. L'attelage royal a un nom : "Créature-d'Ankh-Rê-Horakhty-qui-jubile-dans-l'horizon-en-son-nom-de-Shou-qui-est-dans-l'Aton" (!)
De nombreux chevaux de particuliers sont aussi présents, mais force est de constater que les Égyptiens n'ont jamais vraiment su représenter cet animal introduit tardivement dans le pays.

G- La cérémonie de remise de l'Or de l'Honneur et la fenêtre d'apparition

C'est la scène la plus fréquente dans les tombes amarniennes. Elle se trouve le plus souvent sur le mur ouest, à droite ou à gauche de l'entrée.

La récompense des fonctionnaires méritants et des dignitaires à l'aide de colliers d'or "shebyou" commence à être représentée au milieu de la XVIIIe dynastie et durera jusqu'à l'époque ramesside.
Avant Akhénaton, la cérémonie se déroule au palais, dans la salle du trône et le pharaon est assis sous un kiosque.
À Amarna, Akhénaton, souvent accompagné par la reine Néfertiti et les princesses, se tient au-dessus du récipiendaire, au niveau de la fenêtre d'apparition pour une cérémonie qui se déroule en grande partie en plein air.

1) - La fenêtre d'apparition

Il s'agit d'un nouvel aménagement architectural permettant au roi de se présenter à ses sujets d'une façon à frapper les esprits. Nouvelle forme de représentation royale, la fenêtre d'apparition n’a de sens que dans le contexte de la théologie d'Aton, dont elle représente un des éléments architecturaux les plus caractéristiques. On la retrouve chez Meryre (deux occurrences), Panehesy et peut-être Meryrê II, Houya, Pentou et Toutou.
Comme Aton se révèle au roi, le roi se révèle à ses courtisans : il y a consubstantialité entre le lever du soleil et l'apparition d'Akhénaton. Cet évènement solennel exige un cadre particulier, ce sera la fenêtre d’apparition.

Cette structure a donné lieu à de nombreux débats parmi les égyptologues, à la fois sur son apparence et sur sa situation, car aucune fenêtre n'a pu être identifiée sur le site. On ne la connaît que par les représentations qui figurent dans les tombes. Or ces représentations diffèrent entre elles et obéissent aux lois de l'aspective (cf supra), ce qui les rend encore plus difficiles à comprendre pour nous. De plus, la présence fréquente du roi fausse les proportions architecturales, qui sont mieux appréciées lorsque la fenêtre est vide.
On pense de nos jours qu'il y avait au moins deux édifices qui contenaient ce type d'aménagement : le Palais fluvial nord du roi et la maison royale (King's House).
L'essai de reconstitution ci-contre (dessin d'après Vomberg) s'inspire de la représentation qui figure dans la tombe de Parennefer ().

2) - La cérémonie

Depuis la fenêtre d'apparition, Akhénaton, parfois aussi la reine ou même les princesses (), accoudés sur un coussin rouge décoré de motifs géométriques, lancent des colliers d'or et des bijoux au récipiendaire debout dans la cour (qui reçoit aussi bien d'autres choses qui lui sont apportées directement).
Le dignitaire qui reçoit des colliers se tient debout devant le souverain, les deux bras levés en signe de jubilation (geste "hai" image horemheb). Souvent il est en même temps oint d'onguents ou de parfums, qui jouent un rôle rituel certain, mais mal compris. Au fur et à mesure, des serviteurs récupérent les biens qui viennent d'être lancés ou apportés et les rangent dans des boîtes ou des sacs, comme cela est très bien illustré sur la venant de la tombe de Parennefer.
Le roi peut s'adresser au personnage sous forme d'une harangue, à laquelle celui-ci répond en louant son souverain.

3)- Retour à la maison

Ses colliers autour du cou, le dignitaire (qui porte souvent un cône festif sur la tête) se retourne alors pour se faire acclamer par toute sa maisonnée et la foule présente ; certains des spectateurs dansent (), tandis que d'autres "flairent la terre" devant lui, un geste qu'on ne fait en principe que devant une divinité ou le roi ( et ). Puis il quitte la scène en char ou à pied.

Any, stele Any, stèle

On comprend que cette cérémonie ait eu une importance particulière à Amarna : Akhénaton représente le pouvoir divin suprême sur terre, mais aussi dans l'au-delà, puisqu'il n'y a plus de jugement des morts. Tout repose donc sur la faveur royale, comme le confirme par exemple la stèle Davies 1908 (CG 34177, JE 29748) où on voit Any, récompensé, s'éloigner sur un char, ses colliers d'or autour du cou, avec ce texte : "Que j'arrive en paix, comme un honoré par le roi. Qu'il m'accorde de bonnes funérailles, qu'il me fasse atteindre l'état de transfiguré, en paix". Un texte proche se trouve dans la tombe de Houya.
L'adhésion à la maât (c'est-à-dire l'accomplissement de la volonté d'Akhénaton) et la rectitude de conduite sont des incontournables à respecter journellement pour espérer un avenir post-mortem.

H- La réception des tributs en l'an 12

Dans les tombes de Houya et Meryrê II figure la scène dite de réception des tributs, ou d’accueil des peuples étrangers, qui s'est déroulée l’an 12,2ème mois de la saison Peret, jour 8, date qui peut être considérée comme l'apogée du règne d'Akhenaton.
La scène a été voulue grandiose et réunit trois protagonistes distincts.

Tout d'abord les représentants de tous les peuples étrangers connus des Égyptiens, Asiatiques, Libyens, Égéens, Nubiens, prosternés ou en adoration, qui implorent la paix et le souffle de vie (comme chez Houya, ) (sur le tribut en général, voir ).

Ensuite, le couple royal accompagné par ses six filles et des dames du harem.

Enfin, les spectateurs et surtout les fonctionnaires et courtisans, à qui cette mise en scène est destinée. Car c'est bien à une mise en scène visant à exalter la toute-puissance royale que tout ceci correspond. On montre aux élites une situation idéalisée qui véhicule un message politique : malgré des revers en Asie, l'Égypte est toujours crainte et respectée.

Et il y a sans doute un second message, plus subtil. On note en effet dans les deux cas, une superposition presque complète de la silhouette d'Akhénaton et Néfertiti, qui traduirait un glissement des fonctions royales vers la reine : Akhénaton devient équivalent à Aton et Néfertiti occupe l'espace ainsi libéré, assimilant quelques prérogatives royales.

Cyril Aldred parle de l'an 12 comme de "l’année des merveilles" pour Akhénaton et Néfertiti. On ne sait pas comment ils l'ont ressentie, mais pour Houya () et Meryrê II, cette réception des tributs est l’événement le plus marquant de leur carrière (ce qui fait qu'ils lui ont peut-être donné une importance exagérée, on ne sait pas). Les deux hommes s'occupaient, entre autres, de la gestion de biens de la famille royale et donc probablement de l'échange de biens en provenance du trésor. Ils ont certainement participé à l'organisation de l'évènement.
Reste la possibilité que Meryrê II ait simplement voulu représenter dans sa chapelle la scène présente chez Houya, dont la tombe se trouve à côté de la sienne…

I- Omniprésence des militaires

Nulle part en Égypte et à aucune autre époque, on ne trouve une présence militaire aussi importante qu'à Amarna. Le palais privé d'Akhénaton, qui se trouve tout au nord du site ("palais fluvial nord") abrite une importante garnison qui suit le souverain dans tous ses déplacements, véritable garde prétorienne.
Il y a des militaires et des policiers représentés dans toutes les tombes, souvent en train de courir lorsqu'ils escortent le char royal.
Plusieurs casernes ont été retrouvées sur le site d'Amarna. Le chef des Medjaiou, Mahou, joue d'ailleurs un rôle de premier plan dans la cité. Les Médjaiou forment la troupe d'élite de la garde royale, mais aussi la police du désert ; il s'agit pour l'essentiel d'archers de Basse Nubie.

J- Place de la musique

De petites scènes parallèles à l'action principale se déroulent dans des bâtiments annexes ou des cours. Certaines donnent un aperçu des activités musicales populaires, telles que le tambour et la danse de rue, les sonneries de trompettes pour rassembler les soldats, ou la musique qui accompagne les fêtes.

Dans les temples "on rencontre des musiciens jouant exclusivement pour Aton, le disque du Soleil. Tous sont des hommes âgés, aux crânes rasés et aux robes plissées, la plupart apparemment aveugles. Ils chantent, frappent dans leurs mains et jouent de la harpe, occasionnellement du luth.
Les ensembles de musiciens qui jouent dans le palais royal sont assez différents. Certains d'entre eux sont semblables à ceux qu'on a l'habitude de voir sur les monuments privés avant la révolution amarnienne : ce sont des groupes de femmes en longues robes portant des cônes d'onguent parfumés sur la tête, jouant sur une grande harpe arquée, un luth à long manche, une lyre, un hautbois double ou des groupes d'hommes jouant des mêmes luths et harpes. […] Lise Manniche".

Le chœur d'hommes aveugles, frappant dans leurs mains et accompagnés d'un tambour ne se trouve qu'à l'époque amarnienne. Ces musiciens, aveugles naturellement ou parce qu'ils ont les yeux bandés, sont les seuls hommes qui participent au rituel, car seul Akhénaton avait le droit de communiquer avec l'Aton. Les femmes, par contre, sur le modèle de Néfertiti, étaient autorisées à voir le roi et à chanter pour lui.

K- Les hymnes à Aton

Tous sont gravés sur les murs de tombes privées. La seule occurrence connue du Grand hymne se trouve dans la tombe de Ay, tandis que le Petit hymne existe en cinq versions dans les tombes de Meryrê, Any, Ipy, Toutou et Mahou. Tous les hymnes utilisent la première version du nom didactique d'Aton et ont donc été composés entre l'an 5 et l'an 9 du règne.
Leur fonction exacte n'est pas tout à fait claire. L'interprétation traditionnelle qui en fait des textes liturgiques destinés à être récités ou psalmodiés dans les temples est battue en brèche actuellement. Car ces hymnes s'adressent à Rê-Horakhty, manifesté dans l'Aton, mais aussi à Akhénaton et Néfertiti, mêlant ainsi intimement la louange divine et l'idéologie atoniste.
Le contenu des hymnes n'est guère différent, le Grand hymne est seulement plus développé ; tous deux développent deux thèmes principaux : le cycle quotidien du soleil et la révélation du dieu à son fils Akhénaton. Il s'agit de la transcription de l'enseignement dispensé par Akhénaton lui-même (savoir si c'est lui ou ses théologiens qui l'ont imaginé est une question insoluble).
On peut difficilement ne pas voir dans ces hymnes l'élan mystique d'un visionnaire, mais d'un autre point de vue, nous sommes aussi en présence d'un programme théologico-politique fermé, interdisant les gloses et autres exégèses dont les penseurs égyptiens étaient si friands.

Voici comment on peut résumer leur contenu (d'après Pierre Grandet) :

Grand hymne :

Lever d'Aton qui remplit l'univers de lumière et le place sous le contrôle d'Akhénaton. Le dieu est loin, mais ses rayons sont sur terre.

Au coucher du soleil, tout s'endort et la terre semble morte.

Le matin suivant, la terre revit, tous les êtres sont en fête et vaquent à leurs occupations.

Aton est le créateur de toutes choses dans l'univers et pourvoit au besoin de sa création.

L'action bienfaisante d'Aton, relayée par son fils Akhénaton, justifie le culte qui est une action de grâce.

Petit hymne

Un exemplaire est gravé sur une stèle dans la tombe de Mahou () :

À l'aube, les rayons d'Aton, créateur incréé, emplissent la terre, animent les êtres et manifestent la souveraineté du dieu.

La nuit, la terre et tous les êtres sont dans un état voisin de la mort.

Au lever du soleil, la vie renaît en même temps que le culte à Akhetaton, centre de l'univers.

Aton façonne Akhénaton à son image chaque jour ; lui seul connaît le dieu. Celui-ci, éternel créateur du ciel, contemple sa création et la fait vivre grâce à ses rayons. Tous les êtres, par leur comportement approprié, le louent en action de grâce.

Les autres nécropoles de Tell el-Amarna

Pendant la période d'occupation du site, deux autres cimetières se sont développés :

Une nécropole pour la famille royale

Située au bout du ouadi royal, à 6 km dans le désert à l'est de la ville, elle comporte cinq tombes, toutes inachevées. La tombe d'Akhénaton est la seule décorée. Le roi, sa mère Tyi et trois de ses filles y furent inhumés. Nous lui consacrons une étude spéciale : .

Un cimetière pour les gens du commun

Il a fallu attendre 2006 pour que l'équipe de Barry Kemp trouve enfin, à proximité des tombes de notables du groupe sud, une nécropole de gens du peuple.
Les inhumations sont constituées de simples fosses sans orientation précise, creusées dans le sol, parfois très étroites, volontiers recouvertes de pierres après l'enterrement ().
L'étude anthropologique des squelettes (les corps n'ont pas été momifiés) a révélé une réalité bien sombre quant aux conditions de vie des habitants ordinaires de la cité et montré le désintérêt dont faisait preuve Akhénaton vis-à-vis de ses sujets, bien loin de l'image paternaliste véhiculée par les hymnes à Aton.
Les aliments qui s'empilent sur les tables d'offrandes d'Aton n'ont certes pas profité au commun des habitants : la malnutrition est la règle, la nourriture est insuffisante en quantité et en qualité. De plus, les squelettes présentent des lésions traduisant un travail physique très dur, avec des fractures multiples et d'importantes lésions de la colonne vertébrale, y compris chez des individus très jeunes. La durée de vie dépassait rarement 35 ans et 2/3 des défunts avaient moins de 20 ans.

Les persÉcutions post-amarniennes

La damnatio memoriae s'abat sur tout ce qui concerne la période amarnienne ; elle a notamment touché les tombes civiles du site d'Amarna.
On le sait, les attaques contre Akhénaton ont commencé dès le règne d'Horemheb. Toutefois, le gros des destructions date de l'époque ramesside : les Égyptiens ont alors voulu éliminer de leur histoire l'ensemble des souverains de la période amarnienne (Akhénaton, Smenkarê, Neferneferouaton, Toutankhamon et Ay) : dans les annales, on passe directement du règne d'Amenhotep III à celui d'Horemheb.
Akhénaton avait fait détruire le nom des dieux – et en particulier celui d'Amon - dans les monuments et les tombes ; ses propres cartouches et représentations, ainsi que ceux de Néfertiti seront eux aussi effacés à partir d'Horemheb, mais surtout de Ramsès II, et sa cité d'Akhetaton sera totalement démantelée.

Les tombes de la période amarnienne en dehors d'Amarna

Dans la nécropole thébaine

La première partie du règne (peut-être presque la moitié) se déroule à Thèbes où un certain nombre de tombes ont été mises en chantier : TT 55 (Ramose), TT 188 (Parennefer, qui a également une tombe à Amarna), , TT 46 (Ramose), TT 136 (Ipy), . Leur étude permet de voir la transition entre le style traditionnel et le style amarnien.

La "concurrence" de Saqqara

(voir le chapitre consacré aux tombes du Nouvel Empire à Saqqara dans )

Saqqara est la nécropole de la ville de Memphis, la capitale administrative du pays. De nombreux fonctionnaires exerçent leur activité à Memphis et ont tout naturellement choisi le cimetière de cette ville pour se faire inhumer.
On commence à peine à entrevoir la taille immense de la nécropole du Nouvel Empire. Hasard des découvertes, les tombes de l'époque amarnienne y sont aujourd'hui les plus nombreuses et se trouvent dans deux zones.

En premier lieu, les falaises du Bubastéion, où ont été retrouvées la tombe de Maïa, la nourrice de Toutankhamon, et celle d'Aper-el, un vizir d'Akhénaton.

Une seconde zone est située près de la chaussée d'Ounas, d'où sont sorties des sables avant son accession au trône, celle de , Trésorier de Toutankhamon (qui possède également la tombe TA 14 à Amarna). La tombe de Meryneith (à côté de celle d'Horemheb) a une histoire encore plus singulière. Le personnage change son nom en Meryrê et part à Amarna, où il débute une autre tombe ; puis il revient à Saqqara, reprend son nom de Meryneith () et continue les travaux dans sa première sépulture…

Il faut tenir compte aussi de cette remarque, due à Owen & Kemp :"Nous avons coutume de penser que, pour les anciens Égyptiens, la préparation de leur vie dans l'au-delà était une priorité absolue. La réalité est quelque peu différente. Avoir une belle tombe n'était pas la priorité des priorités dans la répartition des ressources disponibles et en posséder une tenait souvent du vœu pieux." Il semble bien que, pour beaucoup, une bonne maison confortable valait mieux qu'une belle tombe ! Ceci se vérifie à Amarna, puisque le nombre de grandes maisons dans la cité dépasse largement celui des tombes décorées.