CAVEAU, PAROI EST

Reproduite dans de nombreux livres sur l'Égypte ancienne, parfaitement conservée, c'est à cette paroi que la tombe doit une grande partie de sa réputation. Pourtant, sa richesse symbolique n'a peut-être pas été entièrement épuisée par les descriptions qui en ont été faites.

Le cintre

Nous y trouvons la barque solaire Wj3 (Ouia), saluée par deux cynocéphales, qui vogue du nord au sud.
La situation de cette scène apparaît logique : nous sommes dans le ciel de la paroi est, le singe du nord salue le soleil couchant, et celui du sud, son lever matinal. Les clameurs que poussent les cynocéphales, à l'aube et au crépuscule, ont été assimilées à des salutations par les Égyptiens.
La barque () présente une poupe en ombelle de papyrus, encadrée par deux rames-gouvernail rayées, fixées à des poteaux eux-mêmes rayés. La proue est masquée par ce qui semble être une tenture, rouge, pendante au ras de l'eau, d'où s'échappent ce qui ressemble à des boucles. [à l'origine, il s'agit d'une composition végétale]. L'hirondelle perchée dessus ne se voit que dans les tombes de Deir el-Medineh. Elle est en rapport avec les transformations du défunt ; c'est aussi un symbole de régénération, ainsi qu'un messager et un compagnon du soleil pendant son périple.

Un dieu solaire hiéracocéphale se tient assis au centre de la barque, la tête surmontée d'un énorme disque solaire cerclé d'un uræus. Il tient en main une croix de vie. Il est nommé dans le texte : "Ra-Horakhty-Atoum, maître des Deux-Terres, Khépri". Ainsi sont associées les différentes phases de la vie solaire. L'astre naît sous forme du scarabée Khépri, à l'horizon oriental ; Ra au zénith, sa puissance va décroître et c'est en Atoum qu'il se couchera dans l'horizon occidental ; Atoum étant à la fois celui qui est et celui qui n'est plus, re-amorcera le cycle pendant le séjour nocturne de l'astre dans le monde souterrain.
Devant lui, nous retrouvons un grand signe shemset, dont nous avons déjà parlé, avec ici cette particularité graphique de la jambe. Il représente les suivants d'Horus, c'est à dire les morts bienheureux, dont Sennedjem souhaite faire partie.
Derrière le dieu se trouve un petit édifice en forme de Per-nou, le sanctuaire primitif de Bouto, en Basse-Égypte.

La cimaise : les "Champs-Élysées"

Il y aurait beaucoup à dire [NB : et je le ferai probablement un jour] sur la signification exacte de ces domaines agricoles. Leur symbolique ne saurait se comprendre si on ne se réfère pas au chapitre 110 du Livre des Morts, dont ils constituent souvent la vignette. On y trouve l'introduction suivante (Barguet) : "Ici commencent les formules de la Campagne des Félicités, et les formules de la sortie au jour ; entrer et sortir dans l'empire des morts ; s'établir dans le Champ des Souchets, séjourner dans la double Campagne des Félicités, […], y être glorieux, y labourer, y moissonner, y manger, y boire, y faire l'amour, faire tout ce qu'on a l'habitude de faire sur terre, de la part de N."
Dans la "réclame" du chapitre 72, on trouve (De Cénival) : "Celui qui saura cette formule ou sur le cercueil de qui on l'aura inscrite, ceux qui sont dans le monde des morts le verront arriver jubilant. Il sortira le jour sous toutes les formes qui lui plairont et il regagnera sa tombe sans être arrêté ; on lui donnera du pain, de la bière, de la viande dans le temple d'Osiris ; il partira pour le Champ des Roseaux où on lui donnera 10 aroures de champs plantés d'orge et de blé".

Ainsi, le défunt a droit à un domaine personnel, qu'il doit exploiter, et à des versements en nature.

Mais le mort n'a aucune envie de passer son éternité à s'occuper des champs ! Il a représenté la scène sur la paroi de son caveau, afin de marquer magiquement sa propriété vis-à-vis des dieux et des autres défunts mais y travailler vraiment, c'est autre chose !
Pour s'éviter cet ennui, il a eu la précaution de mettre dans son caveau des Serviteurs Funéraires (dont le nombre varie selon les époques). Ces Chaouabtis (ou Ouchebtis) ont un rôle clair : remplacer le défunt, comme cela est rapporté dans le chapitre 6 Livre des Morts qui est souvent écrit sur les figurines : "Ô serviteur, si l'on réquisitionne N. pour effectuer tous les travaux qui sont à faire dans le monde des morts à titre de corvée, ce sera à toi d'en assumer la charge, pour cultiver les champs, irriguer les rives, transporter le sable d'est en ouest et inversement. Alors, tu diras 'présent' quand on fera appel à toi, à quelque moment que ce soit".
Un exemple de ces "répondants" se trouve au Fitzwilliam Museum (e.g. 1887), image de gauche. On remarquera qu'il porte sur les épaules deux modèles de houe différentes.

Comment se présente la scène ?

Des canaux pleins d'eau entourent et cloisonnent une zone centrale elle-même subdivisée en plusieurs registres horizontaux. Dans l'angle supérieur droit (sud-est), des carreaux noirs et blancs pourraient symboliser une entrée, une écluse, le système se présentant ainsi en dérivation par rapport au Nil.
Dans les registres horizontaux, on peut encore séparer la zone du haut, plutôt mythologique, de la zone agricole du bas, laquelle est elle-même subdivisée en trois parties. à chaque extrémité droite (sud) un petit rectangle est réservé pour une saynète complémentaire.
On pourra utilement comparer la scène de la tombe avec celle du .

Registre supérieur

À gauche (nord), Sennedjem et Iyneferti sont agenouillés sur une sorte de tertre à bords arrondis, ils sont "sur leur sable", c'est-à-dire dans le désert de l'empire des morts. Ils récitent une prière de louange devant cinq dieux accroupis sur un signe maât. Le premier est Ra-Horemakhty (Ra-Harmakis), coiffé d'un grand disque solaire ; le second est Osiris-Khentimenty, coiffé de la mitre blanche entourée de deux plumes ; le troisième est Ptah-neb-Maât (Ptah maître de la Maât), coiffé de sa calotte bleue habituelle. Suivent deux dieux ou génies anonymes, censés représenter la cohorte accompagnant les trois grands dieux (dont deux démiurges, tout de même !).
Vient ensuite une scène dont la signification reste obscure () : "son fils qu'il aime, Rahotep, Juste de Voix" navigue dans un frêle esquif vers le sud. Le jeune homme a le crâne rasé, la tête tournée vers l'arrière. La rame dont il est censé se servir n'est pas représentée. Ceci est vraiment étrange, et est habituellement interprété comme un oubli du peintre. L'image et la scène étant parfaitement réalisées, il me semble que si oubli il y a, il ne peut être que volontaire : peut-être l'artisan n'a t-il pas voulu faire passer la rame par dessus le corps ?

C'est un autre fils de Sennedjem, Khonsou, qui pratique sur le cercueil de son père (et donc par magie sympathique sur sa momie) le rite d'ouverture de la bouche, à l'aide de deux herminettes () : "Ta bouche, Sennedjem Juste de Voix, est ouverte". Connaissant le côté terre-à-terre des anciens, il est probable que ce rite animait également le serviteur funéraire qui est censé effectuer le travail à la place du défunt…

Le petit rectangle à droite comporte d'une part le nom et titre de Sennedjem, d'autre part, trois ovales. En se référant à d'autres versions du Livre des Morts, ils sont désignés comme "champ de bataille", "place des offrandes" et "le grand". Il s'agit donc de régions du monde souterrain.

Registre moyen

Il est consacré aux travaux des champs.

La première scène commence par la moisson.

À l'aide d'une faucille en bois, dont le tranchant est incrusté de pierres de silex, Sennedjem, courbé, coupe très haut les épis. Ainsi, la paille ne sera pas abîmée par le piétinement des animaux lors du battage.
Iyneferti suit Sennedjem et ramasse les épis qu'elle met dans un panier. On remarquera au passage la taille des tiges de blé, et l'immensité suggérée du champ que rien ne borne. Dans le monde idyllique de l'Au-delà, les récoltes sont toujours extraordinaires ; il n'y a pas d'oiseaux pour les dévorer, ni de sauterelles qui ravageront tout en quelques minutes. C'est afin de montrer l'abondance des récoltes que la scène de labours et semailles a, sans aucune logique, été déplacée dans le sous-registre du dessous.
Il est également fort étrange de voir les défunts réaliser ces travaux dans leurs beaux atours, avec leurs perruques de cérémonie : une preuve de plus du caractère éminemment symbolique de ces scènes agricoles.

Le sous-registre du dessous commence par une scène d'arrachage du lin.

Celui-ci pouvait se faire à différentes périodes de l'année, selon l'usage auquel était destiné la fibre, qui commandait à la taille désirée de la plante.

Viennent ensuite, en une scène unique, les labours et les semailles

.

Sennedjem pèse sur l'arrière de son araire tiré par deux vaches (les bœufs ne sont jamais utilisés pour ce travail) égratignant ainsi la terre plus qu'il ne la laboure. Il stimule les animaux à l'aide d'un fouet à deux lanières, dont la forme du manche rappelle le hiéroglyphe "hem", serviteur. Iyneferti est derrière lui et semble plutôt jeter les graines que les semer…
Cette scène est assez incohérente. En effet, il y avait deux façons de semer. La première consistait, sur une terre très amollie par l'inondation, à jeter le grain au sol puis à lâcher un troupeau dont les piétinements enfouissaient la semence. La seconde consistait, sur les terres plus dures, à semer, puis à faire passer l'araire pour enfouir le grain. Dans les deux cas, le semeur n'a rien à faire derrière le laboureur. Remarquons que, ici, l'extrémité du champ est bornée par un sycomore.

Le rectangle de droite nous montre Sennedjem assis sur une natte verte qui a été isolée du sol (). Il tient en main une fleur de lotus ouverte vers son visage, symbole de renaissance. Devant lui, une table d'offrande garnie de pains et de végétaux [NB : on en a retrouvé dans la tombe] ; un récipient de vin attend son bon vouloir.

Le rectangle du dessous comporte quatre ovales de couleur qui sont probablement "place des offrandes", "rouge clair", "vert luxuriant" et "maîtresse des deux terres". Tous ces toponymes sont repris du Livre des Morts.

Registre inférieur

Il est divisé en deux par un canal d'irrigation, mais n'en forme en fait qu'un seul. Il s'agit d'un verger, avec une alternance de palmiers dattiers et doums, chargés de fruits, et de sycomores. Les fleurs représentées en bas se trouvent entre les arbres. Elles sont de trois espèces : coquelicots, bleuets et probablement des mandragores.

Bien que non matérialisé, l'artiste a individualisé un autre rectangle à droite de ce registre (). Un îlot est circonscrit par des bras d'eau. Dans une crique se trouve la barque Djed-tefet, qui est celle d'Harmakis. L'esquif est symétrique, avec une proue et une poupe en forme de serpent, indistinguables, et des avirons de gouverne à l'avant comme à l'arrière. La barque peut donc naviguer dans les deux sens, diurne et nocturne. En son centre se trouve une sorte d'escalier de quatre marches montant du nord au sud, représentant la butte primitive.

CAVEAU, PAROI OUEST

Il est orné de représentations du monde funéraire, en opposition au mur est que nous venons d'examiner.

Le cintre

La composition est symétrique par rapport à un axe central. Cet axe est composé d'un guéridon blanc, sorte d'autel qui supporte un vase canopique étiqueté, entouré de deux lotus entrecroisés. Au-dessus, un vase surmonté des 3 lignes ondulées valant pour "Noun" (l'océan primordial d'où le monde est sorti), et coiffé d'un hiéroglyphe cerclé "shen". Deux yeux Oudjat (sans larmier) l'encadrent, témoin du corps reconstitué.
Cet ensemble, hautement symbolique de renaissance, est entouré et protégé par deux canidés. Leur corps couleur lapis est surmonté par un fouet. Le ruban rouge autour de leur cou reste d'interprétation controversée, peut être s'agit t-il d'un signe chtonien. Les deux animaux reposent sur une le toit d'une construction plate, blanche dont la façade est percée d'une porte qui correspond à l'entrée de la chapelle funéraire du défunt, et plus généralement du monde souterrain, représentée à l'antique, comme un mastaba. Ils font donc pendant aux deux babouins du cintre oriental qui saluent le soleil renaissant.

La cimaise

Un seul tableau occupe l'espace : le couple Sennedjem – Iyneferti s'avance en confiance, rendant hommage aux dieux de la Douat qui siègent dans une chapelle : "Louanges soient faites aux dieux de la Douat, par l'Osiris, le serviteur dans la Place de Vérité, Sennedjem, Juste de Voix ; son épouse, qu'il aime, la maîtresse de maison Iyneferti, Juste de Voix".

La chapelle est un grand édifice surmonté d'une frise de cobras cracheurs, dont la tête est coiffée d'un disque solaire. Sous la corniche à gorge, on retrouve la représentation osirienne de la vigne.
Les dieux sont tous assis sur un signe maât et regardent vers le sud. Ils sont disposés en deux rangs, sur un fond blanc :
- En haut, six divinités se succèdent, avec à leur tête Osiris. Ce dernier porte la barbe à bout recourbé des dieux morts, et il est coiffé de sa couronne traditionnelle, ainsi que d'un collier à contrepoids.
- En bas, nous trouvons Ra-Horakhty, suivi de six divinités, là encore anonymes, qui valent pour les dieux de la Douat.
- Les deux registres sont séparés par trois lignes de texte hiéroglyphique, un extrait du chapitre 190 du Livre des Morts : "Un écrit pour rendre l'esprit-Akh (du défunt) excellent dans le cœur de Ra, pour lui donner pouvoir devant Atoum, pour le rendre grand devant Osiris, pour le rendre fort devant Khentyimentyou, pour lui donner autorité devant l'Ennéade.
Un traitement du cœur de l'esprit-Akh, pour qu'il puisse sortir au loin, qu'il puisse retrouver sa foulée, pour écarter la surdité, et pour ouvrir son visage en compagnie des dieux".

Devant la chapelle se trouve Sennedjem, représenté de taille humaine, les deux bras levés en adoration. Il porte le pagne à devanteau à la mode à l'époque ramesside. Il n'a pas de bijou, mais un cône d'onguent est posé sur sa perruque. Iyneferti est derrière lui, en grande robe, mais également sans bijou. Seule une fleur de lotus est piquée dans sa perruque. Sa main droite est levée, tandis que dans sa main gauche, elle tient une tige de lotus ouverte ().

LE PLAFOND

Il est magnifique, et parfaitement conservé.
Nous avons déjà signalé que la voûte présente une forme bombée, afin d'imiter aussi bien le couvercle d'un sarcophage de type nubien, que les bandelettes qui entourent un corps momifié, ou que la voûte céleste. Il est cloisonné, longitudinalement et transversalement, par des bandes blanches portant des textes. Ainsi sont délimités 8 "caissons", 4 au nord et 4 au sud. Tous reflètent la participation du défunt à la vie céleste, et notamment à la vie solaire à ses différentes phases. Sennedjem veut faire partie des dieux qui accompagnent l'astre pour le temps infini et le temps éternel.

Les caissons sont indissociables des deux cintres des parois est et ouest, que nous avons déjà examinés. L'ensemble voûte-cintres forme un tout, d'ailleurs nettement séparé des scènes de parois. La lecture des scènes se fait d'est en ouest, suivant le trajet solaire.

Les bandes de textes

1) - Les bandes longitudinales

Elles portent des formules d'offrandes traditionnelles ()

Au sud

"Offrande que le roi fait à Hathor, première dans la nécropole, et aux dieux et déesses qui sont dans la Douat. Puissent t'ils donner l'entrée et de nouveau la sortie du monde souterrain.
Ne pas être refoulé à la porte de la Douat
(N.B : le caisson montrant Sennedjem s'apprêtant à franchir la double porte de l'Au-delà, se trouve immédiatement sous ce texte) .
Pour le Ka de l'Osiris, le serviteur dans la Place de Vérité à l'ouest de Thèbes, Sennedjem, Juste de Voix"

Au milieu

"Offrande que le roi fait pour Osiris-Ounnefer, premier dans l'Occident, fils aîné de Geb, le plus grand des cinq, père de tous les dieux, seigneur d'Aker, souverain de Haute et Basse Égypte, seigneur de l'éternité ; (pour) Ptah-Sokar, seigneur de la place cachée ; qu'ils me donnent de l'air et de l'eau. L'Osiris, le serviteur dans la Place de Vérité, Sennedjem, Juste de Voix".

Au nord

"Offrande que le roi fait pour Ra-Horakhty-Atoum, seigneur du Double-Pays, l'Héliopolitain, qu'il me donne gloire au ciel, puissance sur la terre, d'être justifié dans le monde souterrain, puissant à la tête des dieux ; puisses-tu t'emparer de la proue de la barque Meseketet (barque de la nuit) et la poupe de la barque Mandjet (barque du jour), pour le Ka du serviteur de la Place de Vérité, Sennedjem, Juste de Voix."

2) - Les bandes transversales

Elles se lisent toutes à partir de la bande longitudinale centrale. Elles portent, de manière symétrique entre la moitié est et ouest, des noms de divinités (voir ci-contre).
C'est ainsi que Thot figure quatre fois, désigné comme "Seigneur des paroles divines" (les hiéroglyphes), ou "Seigneur de Khemenou" (Héliopolis). Anubis occupe la bande médiane. Les quatre autres sont les "fils d'Horus", qui ont en charge les vases canopes où reposent les viscères momifiés du défunt : Amsit, Hapy, Douamoutef, Qebehsenouef (pour plus de détails, lire: ).

Les caissons du côté sud, d'est en ouest

Caisson 1

Il faut comprendre la scène (dont on notera la qualité) comme la suite immédiate du cintre est. Elle est tirée du chapitre 109 du Livre des Morts, qui débute par : "Formule pour connaître les âmes de l'Orient".
Le nouveau soleil renaît à l'horizon, sous forme d'un petit veau à pelage blanc tacheté de noir. Sur son dos, il porte le défunt, lui aussi régénéré et qui participe de la renaissance de l'astre. Sa verdeur nouvelle est attestée par la couleur de ses chairs.
Comme toujours dans ce type de scène, deux arbres sont représentés ; leur feuillage bleu-verdâtre suggère le lever du soleil du côté du désert arabique et, plus loin, du Sinaï d'où on extrait la turquoise. Il s'agit des "deux sycomores de turquoise entre lesquels sort Ra".
Il faut donc comprendre que le veau ne passe pas derrière les arbres, mais bien entre eux.
Dans de nombreuses autres tombes, on représente derrière l'animal la montagne de l'ouest, domaine de la déesse Nout et d'Hathor. Il est donc naturel que les Égyptiens aient donné cette forme bovine au fils de la vache céleste Nout ; il existe de plus une homophonie entre le nom égyptien du sycomore et celui de la déesse.
Un grand soleil rouge annonce le triomphe futur de l'astre, symbolisé par la présence du dieu "Ra-Horakhty-Atoum, l'Héliopolitain", coiffé du même disque, mais cette fois entouré d'un uræus.

Caisson 2

Sennedjem est régénéré ! Il se présente, comme dans les deux caissons restants, debout, les mains levées en adoration. Pourquoi porte t-il ici un pagne à devanteau et dans les deux scènes suivantes un pagne simple à petits plis ? Mystère.

Quoi qu'il en soit, il rend hommage ici à trois divinités assises sur un signe maât : Horus à tête de faucon, suivi de deux des quatre fils d'Horus, Amsit et Hapy.
La scène est tirée du chapitre 112 du Livre des Morts : "Connaître les puissances de Bouto". Outre une sombre histoire où le regard jeté sur un porc noir ravive la blessure que Seth avait causée à l'œil d'Horus, il est également fait mention des quatre fils d'Horus : "Mets deux frères à Bouto et deux frères à Hiérakonpolis de cette mienne corporation […] je connais les Puissances de Bouto : c'est Horus, c'est Amsit, c'est Hapy".
Le texte de Sennedjem s'adresse à "Tous les dieux de Vérité" (Netjerou nebou Maât) .

Caisson 3

Sennedjem se rapproche de l'Occident, et la scène dérive du chapitre 108 du Livre des Morts : "Formule pour connaître les âmes de l'Occident". On y décrit le châtiment d'Apophis par Seth : "Un serpent est au sommet de cette montagne ; il a 50 coudées de long et 3 coudées de sa partie antérieure sont en silex. Je connais le nom de ce serpent : celui qui est sur sa montagne, celui qui est dans son haleine embrasée est son nom". Ceci nous explique la représentation du serpent sur un signe de l'horizon : il va essayer de s'opposer au passage de la barque de Ra à son couchant. Au-dessus de lui, un dieu anonyme du domaine chtonien, surmonté d'un signe du ciel qui délimite la partie supérieure de l'espace réservé.
Devant, Sennedjem rend hommage à deux divinités anonymes de l'ouest. La première a le museau allongé d'un canidé, blanc tacheté de noir.
Le texte de Sennedjem s'adresse à "Tous les dieux de la Douat" (le monde souterrain).

Caisson 4

Nous sommes maintenant presque à l'Occident. Sennedjem est face à trois dieux assis, une fois de plus, sur un signe maât. Le premier, facilement reconnaissable à sa tête d'Ibis, est Thot, ce qui est confirmé par le texte qui s'adresse à lui : "Louanges à Thot, seigneur d'Hermopolis, scribe véritable de l'Ogdoade" ; le second est Sia, la connaissance ; le troisième est Atoum, le démiurge créateur coiffé de la double couronne.
La scène n'est pas évidente, car elle ne constitue pas la vignette d'un chapitre précis du Livre des Morts. En fait, elle se rapporte au moins à deux chapitres, 114 et 116.
Sia est souvent associé à Hou, personnification du verbe créateur. Dans le Livre de l'Amdouat, Sia et Hou (ou parfois Héka, la magie) sont les seuls dieux à accompagner le soleil nocturne dans sa barque.

Les caissons du côté nord, d'est en ouest

Caisson 5

Il est d'une très belle facture.
Sennedjem et Iyneferti viennent de rentrer dans le monde souterrain, dont la frontière est matérialisée par la porte du mastaba. En costume de fête, cône d'onguent sur la perruque, ils boivent l'eau, contenue dans un vase qeb, qui est versée par la déesse dans leurs mains réunies.
La déesse-arbre est "Nout, la grande". Elle fait corps avec un sycomore dans lequel ses jambes se fondent harmonieusement. Cet arbre représente pour l'égyptien la preuve de la présence d'eau, ainsi qu'un dispensateur d'ombre et de figues. Cette abondance de bienfaits est symbolisée par le plateau que tient la déesse, sur lequel sont disposés fleurs, fruits et pains.
La vignette illustre le chapitre 59 du Livre des Morts :"Formule pour vivre de la brise, et avoir de l'eau à volonté dans l'empire des morts".

Caisson 6

La scène, magnifiquement réalisée, est une des plus souvent reproduites dans les livres d'art sur l'Égypte. C'est d'ailleurs elle qui avait été choisie pour l'affiche de la grande exposition organisée par le Louvre en 2002 : Les artistes de Pharaon.
Sennedjem et son épouse, debout, face à l'ouest, sont cette fois dans la partie droite du tableau. Sennedjem a repris son pagne simple et ne porte plus ni cône d'onguent ni barbe. Iyneferti, au contraire, a gardé le cône ruisselant d'huile parfumée et garni de grains d'encens et de lotus bleu. On remarque, sur l'abdomen de Sennedjem, ce qu'on a nommé les plis de graisse qui ne sont pas un signe d'obésité. Les deux personnages saluent des deux mains un groupe de cinq génies, qui se détachent sur un fond bleu lapis, accroupis sur un socle en forme de hiéroglyphe Maât.
Tous ces génies portent des perruques semblables, une barbe osirienne, un grand collier de perles. Leurs visages sont de teintes variées comme leurs linceuls, uniquement pour éviter la monotonie. Au-dessus d'eux, sept étoiles jaunes, disposées en deux rangs de trois, et une seule en-dessous, sont surmontées par un disque rouge. Le nombre et la disposition sont absolument arbitraires et n'ont pas l'intention de représenter une constellation connue, comme le montrent d'autres exemples à Deir el-Medineh.
L'âme du défunt devait prendre place parmi les étoiles Impérissables et les Indestructibles, ces astres innombrables dont Osiris fut le premier représentant, en qualité d'Orion.
Le disque rouge, qui accompagne les étoiles, est parfois entouré d'un cercle blanc ce qui veut indiquer que c'est le soleil mort, c'est-à-dire le soleil nocturne, la lune. Ce soleil mort, c'est Osiris lui-même, souverain de tous les astres. Erik Hornung (Das Totenbuch der Ägypter, p.262) a suggéré qu'il pourrait aussi s'agir d'une éclipse solaire au moment d'une nouvelle lune, et non de la lune elle-même. La vignette serait alors à rapprocher du chapitre 135 du Livre des Morts : "Autre formule à dire quand la lune est nouvelle, le 1er du mois".
Ici, Sennedjem s'adresse à "Tous les dieux du ciel", ce qui équivaut à dire : "tous les élus assimilés aux étoiles dans la cour céleste du soleil".

Caisson 7

C'est l'illustration du chapitre 100 du Livre des Morts : "Livre de glorifier le bienheureux et de faire qu'il descende dans la barque de Ra avec sa suite".
Ra-Horakhty-Atoum se tient debout sur sa barque Iouya. Celle-ci présente une poupe et une proue en forme d'ombelle de papyrus. Elle porte un œil-oudjat à l'avant et à l'arrière. Elle navigue d'ouest en est sur le Nil souterrain.
Devant Ra se tient l'oiseau Benou, grue de Numidie au plumage bariolé, couronné de la couronne Atef, symbole de paternité de tous les dieux. Malgré ce qu'on lit souvent, cet oiseau n'est pas l'équivalent du Phénix, c'est le "Ba de Ra".
A sa suite, sur un seul rang, marchent, bras pendants, cinq hommes à barbe osirienne et la légende les appelle : "Les dieux de la grande ennéade qui sont dans la barque". Ces êtres divins, ou ces élus parmi lesquels le défunt est autorisé à prendre place, sont les courtisans du maître et les matelots de l'esquif. Ils se substituent ici au symbole habituel des suivants, Shemes.

Caisson 8

Cette vignette aussi est bien connue. Elle est cependant plus riche en symboles qu'on ne pense. Habituellement, la scène est rapportée comme : Sennedjem, arrivé à l'Occident, va pousser la porte jaune à lattes noires et entrer dans le monde inférieur. D'ailleurs, dans une autre tombe, cette porte est désignée comme "La grande porte secrète de la Douat".
C'est un peu plus sophistiqué.
Remarquons tout d'abord que la porte s'inscrit entre le signe du ciel en haut et la double colline de l'horizon en bas. Ensuite, si nous regardons les gonds, ils sont enfichés au milieu et non sur les côtés ; il est donc clair que nous n'avons pas affaire à une porte à deux battants, mais bien à deux portes différentes, correspondant aux deux horizons. Et ce, dans le monde divin (ciel) et terreste (colline).
Et ce n'est pas un hasard si le caisson 7 adjacent montre la barque solaire : elle vient de sortir par le vantail Occidental, tandis que Sennedjem va rentrer par le vantail Oriental. Et, comme il fait partie de l'équipage de la barque, il sort lui aussi par le vantail Occidental…

LES OBJETS DU CAVEAU

Ils sont hélas dispersés entre plusieurs musées. Tous les objets ont été répertoriés dans la thèse de Mme Marta Saura Sanjaume (voir bibliographie ci-dessous). Je vous invite donc à vous y reporter.
A signaler, un fragment du célèbre papyrus "Sinouhé" sur un ostraca , et un autre, beaucoup plus grand (>1m), sur . Au passage, pour les personnes intéressées par toutes les récensions connues de Sinouhé, voyez .

Sur le site du Metropolitan Museum of Arts se trouvent de fort belles images de certains objets. Les cercueils de Khonsou, fils de Sennedjem, sont particulièrement impressionnants :  ; on trouve également au Met qui recouvrait la momie d'Iyneferti.

Au musée du Caire se trouvent plusieurs objets, notamment les magnifiques sarcophages de Sennedjem (, ) et Iyneferti ().

En 2011 est paru à l'IFAO un catalogue des objets funéraires provenant de la tombe (voir bibliographie ci-dessous)