PAROI OUEST

Partie nord

Cette partie de paroi a beaucoup souffert (). Sur le registre inférieur, en partant de la gauche et après une importante lacune, on trouve une grande vache noire et blanche suivie d’un grand taureau blanc et rouge. Devant lui subsistent les traces d'un homme (). Une légende, peinte en noir, dit "Fais une bonne route. Vois le souverain…" (). Il ne reste plus rien des scènes d’élevage qui devaient se poursuivre à droite.
Plus à droite, et probablement jusqu'à l'angle nord-ouest, se trouvaient des scènes de guerre, ce qui est très rare avant le Nouvel Empire. Il n'en reste que d’infimes traces. La "troupe fidèle et vaillante de Héfat", était représentée ici en pleine action, d’après les constatations faites lors de la première étude de la tombe. Outre les Égyptiens, on y trouvait également des archers Medjaï reconnaissables à leur peau pigmentée, leur pagne en peau colorée à retombée frontale, leurs bracelets et périscélides. Une scène montrait un Medjaï percé d'une flèche.
La troupe est représentée aussi sur la paroi Est, c'est-à-dire juste en face, en train de défiler. Le visiteur de la tombe, sans bouger de sa place, voyait donc l'armée du nomarque en action d’un côté et à l'honneur de l’autre.
Dans cette paroi a été creusée une petite niche dont le décor a disparu ().

Partie sud

()

On trouve ici les scènes les mieux conservées de la tombe. Les couleurs sont inhabituelles notamment le vert clair, mais les sujets traités mettant en scène Ankhtifi et sa famille sont des plus classiques : chasse au bâton de jet, pêche au harpon. Cependant, une scène particulièrement originale nous donne de précieuses indications sur la divinité locale, Hémen, et sur le rituel qui lui est attaché.

1) -La scène de chasse aux oiseaux dans les marais

Elle se trouve sur la partie droite de la paroi, la plus proche de l’entrée ; elle est limitée sur la droite par trois bandes verticales, bleue, blanche et jaune ().

Registre supérieur

Ankhtifi, en taille héroïque est debout, tourné vers la gauche, dans un bateau fait d’un assemblage de bottes de papyrus dont les liens sont représentés par des bandes verticales de couleurs variées. La scène est hélas en lacune au-dessus du pagne d’Ankhtifi. Le nomarque est accompagné de "Son épouse aimée Nébi " accroupie à ses pieds. Elle tient dans sa main gauche une tige de papyrus (?) et dans la main droite le bec d'un canard au cou démesurément long ().
À l'arrière du bateau se tient, dans un curieux équilibre, un homme non identifié dont la tête, le cou et le bras gauche manquent ; vêtu d'un pagne court, il tenait dans sa main droite levée un canard ().
Devant l’embarcation, le fourré de papyrus, qui forme, comme dans tous les tableaux de ce genre, l’unique décor, est traité d'une manière tout à fait originale : une même tige semble porter plusieurs ombelles alors que, en réalité, chaque ombelle appartient à une tige différente ; l'artiste a voulu traduire ainsi l'uniformité du fourré. Celui-ci sert d’abri à de nombreux oiseaux ; à l'exception d’un héron, ce sont tous des canards (, , ).

Registre inférieur

Il est réservé au marais et aux nombreux poissons d'espèces différentes qui le peuplent (, , , ). À signaler la présence - qui n'est attestée nulle part ailleurs - d'alestes dentex et d'hydrocyon forskalii (ou chien du Nil), poissons d'eau profonde qui sont rarement présents dans les filets des pêcheurs égyptiens.

2) -Le décrochage de la paroi

Aussitôt après le fourré de papyrus, la paroi ouest fait un double retour à angle droit qui s'explique par la présence de deux failles (). L'artiste avait donc à sa disposition entre les deux larges surfaces une étroite bande, tout en hauteur, orientée, non plus nord-sud, mais ouest-est ; il a choisi d'y représenter quatre beaux canards superposés ().

3) -La scène de pêche au harpon

() Cette scène se trouve à gauche du retour de paroi. C'est l’une des plus belles de la tombe, notamment à cause des couleurs chatoyantes des poissons (). La place qui a été attribuée aux poissons est cependant curieuse et traduit l'inspiration personnelle de l'artiste. D'habitude, ils occupent le registre inférieur, à l'exception des deux bêtes harponnées par le chasseur. Ici, les poissons se trouvent tous devant le nomarque et semblent nager en plein air, comme si le plan d'eau avait été rabattu à angle droit devant le harponneur. La disparition de l'arrangement en registres, tout comme le non respect des cadrats pour disposer les signes hiéroglyphiques sont fréquents au cours de la Première Période Intermédiaire.

a) -Registre moyen

Ankhtifi est représenté sur un canot de papyrus très stylisé puisque les bottes végétales ont disparu au profit des attaches représentées sous forme de rectangles multicolores ().
Le nomarque, en taille héroïque, porte une perruque longue couvrant les oreilles et ornée d’un bandeau. Il est vêtu d’un pagne à languette, rayé verticalement de bandes alternativement jaunes, vertes, blanches et beiges, et porte un baudrier, un ceinturon, un collier et des bracelets. Au niveau de son visage figure une inscription : "Voir harponner les poissons par le chef des soldats, le chef des prophètes, Ankhtifi l’excellent" (). À la hauteur de sa taille figure une seconde inscription : "Harponne la tête [?] harponne ! (car) Sekhet, cette dame des bonnes offrandes, frappe (des victimes) pour le Ka d’Ankhtifi, l’excellent, justifié" ().
Le bras droit du nomarque a disparu ; il était évidemment levé, la main droite empoignant la hampe du harpon. La main gauche serre un curieux objet formé d'une bobine cylindrique, mobile autour d'un axe, lui-même fixé aux deux extrémités d'une sorte d’anneau en forme de fer à cheval (, ). Une des extrémités d'une corde est fixée au crochet du harpon, qui a déjà pénétré dans le corps des victimes - un tilapia (Oreochromis niloticus) et une perche du Nil (Lates niloticus) (, ) - tandis que l'autre est enroulée autour de l'anneau, permettant ainsi de ramener les prises.
Ankhtifi était accompagné de sa femme et de deux de ses filles, placées sur des niveaux différents. Cette partie était encore visible dans les années 1960 () ; elle est aujourd’hui complètement en lacune (voir aussi ). On notera l'absence de ligne de sol sous les pieds des personnages qui, de ce fait, semblent flotter en l'air.

b) -Registre supérieur

Il n'en reste que d'infimes traces. On aperçoit une jambe d’homme, un trait noir vertical et un trait noir horizontal, puis deux pattes d'échassier (probablement une grue), deux traits noirs formant un angle obtus, et enfin deux autres pattes d'échassier (). On pense évidemment à une scène de chasse au filet hexagonal, mais sans certitude.
Sur la gauche subsistent encore les traces d'un filet à mailles blanches sur fond bleu appartenant peut-être à une scène de pêche à la traîne.

c) -Registre inférieur

Il comporte une scène de pêche à la traîne. Jusque dans les années 1960, on pouvait voir des hommes debout sur la rive, tirant le filet, trois à droite et trois à gauche ; un seul est conservé à peu près en entier ().

Plus à gauche, à moitié perdues dans une lacune, on aperçoit les traces d'un haveneau, filet qui a l'aspect d'une longue poche conique que l'on tient par deux batons. Trois poissons ont été pris dans le filet, ce qui dans la symbolique égyptienne est le signe du pluriel et donc ici veut dire "beaucoup". Au-dessus du haveneau se trouve une nasse (Vandier) figurée comme un grand panier conique frangé à la partie inférieure [NB : on peut avoir un doute sur le fait qu'il s'agisse bien d'une nasse].

Elle est peinte en rouge et ornée de bandes blanches.
À gauche de la nasse et sous les pieds d’Ankhtifi et de son fils figure une inscription () : "Horus apporte une (bonne ?) inondation à son fils Néferkaré. Inspecter toute navigation de Hémen". C’est le seul cartouche royal et l'unique référence à un roi dans cette tombe. Cette inscription commente la scène dite "navigation de Hémen" décrite ci-dessous.

4) -La "navigation de Hémen"

()

La scène est tout à fait originale et de ce fait assez difficile à interpréter. Ankhtifi, dont la tête a disparu, est représenté debout, en taille héroïque (, , photo prise dans les années 60). Penché vers l'avant, il s'appuie sur sa canne (). Il est vêtu d’un pagne chendjit blanc et porte un collier. Son nom était écrit devant lui, au-dessus du serviteur qui lui présentait l’offrande du khepesh, la patte avant droite d'un bœuf.
Le prince est accompagné de ses quatre fils, représentés à une échelle beaucoup plus petite ; une légende identifie un d'entre eux : "[Son fils], son aimé, le chef du nome du Rural [dans] son [entier], Idy" (). Les deux premiers, dont Idy, ont presque entièrement disparu dans une lacune ; sans doute les jeunes princes tenaient-ils chacun une pagaie comme leurs frères qui sont placés, l'un derrière son père, et l’autre entre la canne qu'il tient d'une main et la jambe avancée d'Ankhtifi (). La pagaie témoigne de leur participation active aux festivités de Hemen.

La scène de boucherie que l’on trouve face au nomarque, pour curieux que cela puisse paraître, est bien à sa place ici (, photo prise dans les années 60). Le dépeçage du bœuf et l'offrande de la patte antérieure, qui constituent d’abord un rituel religieux et funéraire, sont associés ici à la grande scène de l'inspection de la flotte que nous verrons ci-dessous. Le bœuf, une bête à robe blanche piquetée de noir, est couché sur le dos. Le boucher restant (trois autres ont disparu) tient à deux mains un grand couteau avec lequel il s'apprête à égorger la victime ().

La partie nautique

se trouve à gauche du nomarque ; elle est très dégradée. Il n'est plus possible de dire exactement quel était le nombre de bateaux présents (, ). Le dernier esquif visible avant la grande lacune se trouve à gauche : il n'en reste aujourd'hui que la cabine, quelques cordages, et une partie d'un des hommes d'équipage. La cabine est fermée par des rideaux décorés en damiers blancs et noirs ; un bouclier de bois, recouvert de cuir, est accroché à la paroi latérale (). Le seul homme d'équipage qui soit encore visible est accroupi sur le toit de la cabine : cet homme est chargé de la manœuvre des bras de vergue. Après une vaste lacune, la scène de navigation reprend à l'extrémité sud de la paroi ouest. Deux grandes barques à rames, se dirigeant vers le nord, occupent le registre inférieur. Toutes deux sont fragmentaires (, ).

La scène de la chasse à l’hippopotame se trouve au-dessus des bateaux. Il ne reste qu’une vague trace de l’animal et de deux harpons parallèles qui ont pénétré, l'un dans le dos, et l'autre, dans l'arrière-train de la victime. Un troisième harpon est planté dans ce qui devait être la tête. Il ne fait aucun doute que les chasseurs sont le nomarque lui-même et deux de ses fils (, ), à la différence de ce qu'on trouve à Guiza et Saqqara où le maître laisse cette chasse dangereuse à ses serviteurs.

La fête de Hémen

Nous savons peu de choses sur le dieu Hémen. Il s'agit d'un dieu faucon proche d'Horus et, comme ce dernier, adversaire de Seth. Une fête était célébrée dans les environs de Mo'alla, portant le nom (ou incluant) la "navigation de Hémen". Nous ne savons pas si la cérémonie avait lieu avec une certaine régularité ou à l’occasion d’un événement particulier. On peut admettre un rapprochement entre cette "navigation de Hémen" et la sortie processionnelle du dieu qui est plusieurs fois mentionnée dans la biographie d'Ankhtifi (inscription 8).
La fête devait commencer par une sorte de joute nautique, au cours de laquelle les matelots accomplissaient quelques prouesses sur leurs barques ; c'est la raison pour laquelle les embarcations, au lieu de défiler en ordre comme dans une inspection militaire vont les unes vers le Nord et les autres vers le Sud.
Ankhtifi, accompagné de ses fils, préside à la cérémonie. Les pagaies que tiennent les jeunes princes sont là pour montrer que ceux-ci participaient activement à la cérémonie.
Le programme liturgique prévoyait la mise à mort d'un hippopotame, symbolisant la défaite de Seth. C'était le moment culminant de la fête. Le nomarque lui-même, aidé de quelques membres de sa famille, se chargeait de harponner l'animal, conformément à une tradition fixée dès les textes des Pyramides, formule 235.
On trouvera des éléments sur le culte de Hémen et son rituel dans Willems (voir bibliographie)

PAROI SUD

La scène de navigation précédemment décrite se poursuivait sur la paroi sud. Il ne reste qu'un fragment de bateau papyriforme à coque jaune (). On note la présence ici d’un pilastre inutile ().