La pièce longitudinale ('couloir')

Il s'agit d'une pièce à part entière, appelée dans des textes contemporains 'le long chemin vers l'Occident', qui communique d'un côté avec le hall transversal, de l'autre avec la salle hypostyle du fond, par une ouverture mesurant environ 1,10m de large et 1m de long, sans décoration visible actuellement, bien qu'il y en certainement eu à l'origine. La pièce mesure 10m de long et 2m de large, ce qui, associé à un plafond de 4m de haut, lui donne un aspect très étroit.

Le décor n'est plus tant destiné au visiteur qu'à Sennefer lui-même. On passe graduellement de scènes terrestres vers d'autres plus symboliques au fur et à mesure qu'on avance dans le couloir, et que la luminosité diminue.
Lorsque les mêmes thèmes sont repris, les scènes qui étaient au sud dans le hall sont maintenant au nord, et réciproquement, ce qui confirme l'intérêt -relativement nouveau- d'étudier le décor d'une tombe en tenant compte des correspondances entre parois et entre salles.
On retrouve la frise de khakherous du sommet et les frises égyptiennes à rectangles, le bandeau du bas et une zone anépigraphe de 1m au-dessus du sol. Comme on peut le voir sur la vue ci-contre, il reste beaucoup de travail de restauration à faire, mais on peut avoir déjà une bonne idée des décors sur l'extrémité est des deux parois. Une du nettoyage du plafond donne une bonne idée du travail accompli (à droite) par rapport à l'état d'origine (milieu).

1) - Murs est et ouest

On ne peut actuellement rien en dire. Malgré leur étroitesse, ils sont susceptibles de porter des textes.

2) - Mur sud

Il est divisé en deux parties.

A- Partie est

Elle comporte quatre registres consacrés à des scènes d'agriculture supervisées par Sennefer. Toutes les phases du cycle sont représentées, depuis le travail de la terre par les paysans, la moisson à la faucille, le vannage, jusqu'aux qui enregistrent les résultats de la récolte, et même le chargement des grains dans des bateaux, afin d'être transportés dans les greniers des temples. Toutes ces activités sont épicées de nombreuses conversations, ou d'encouragements des travailleurs. En voici quelques unes, qui n'auraient pas dépareillé à l'Ancien Empire, époque à laquelle elles étaient beaucoup plus nombreuses :
Un homme tenant la charrue dit à ses bœufs : "Vas-y, vas-y, avance ! Regarde, le maire veut le travail"
Un homme qui observe le précédent : "Tu leur parles durement. Les bœufs, enlèvent leur leur harnais et fait les boire.
Et le premier de répondre : "Réjouissez-vous, les bœufs. Voyez, nous vous enlevons votre harnais afin que vous puissiez passer la journée dans les terres plus humides en présence du maire".
Un homme en train d'attacher quelque chose dit : "Que le maire est gracieux, l'homme bon du roi, aimé de son souverain".
Le capitaine d'un bateau en cours de chargement encourage les porteurs : "Continuez a en apporter pour Amon-Ra, afin qu'il nous donne une bonne navigation".

B- Partie ouest

Sennefer et son épouse sont tournés vers l'ouest et le maire présente, par-dessus une pile d'offrandes, un bouquet monté d'Amon à son cousin Amenemopet et à sa femme, assise derrière lui.
Le texte de description de la scène dit : "Être assis dans une salle de fêtes et passer un jour parfait avec son frère (ici, cousin), qu'il aime, un qui est unique et efficient pour le dieu bon, le directeur de la cité et vizir, Amenemopet, dit Pairi, le prince, le comte, l'ami unique, le confident du seigneur des Deux terres, celui qui est apprécié par le dieu bon, à qui il a donné les deux cœurs d'argent et d'or".
Les deux cœurs auxquels il est fait référence ici constituent le bijou d'un pendentif réalisé dans les deux métaux précieux, chaque cœur comportant en son centre un cartouche au nom Amenhotep II. Le bijou est porté au bout d'une chaîne qui se trouve sous le grand collier pectoral.
Nous retrouverons ce bijou sur la plupart des images de Sennefer, aussi bien dans la chapelle que dans le caveau. Il s'agit probablement d'une décoration honorifique accordée par le roi à certains de ses sujets en reconnaissance de services rendus, ou comme marque d'affection. En Égypte ancienne, le cœur représente le centre des émotions et des sentiments, ainsi que le siège de la pensée et de la mémoire. Cette distinction restera en usage pour les nobles, mais aussi pour des artisans de Deir el Medineh jusqu'à la période ramesside.

- Le texte accompagnant Sennefer dit : "Arriver en portant un bouquet d'Amon, après être sorti du grenier des offrandes divines, après avoir donné le blé afin de faire le rite de la divine offrande d'Amon, ainsi que celle des dieux qui sont à sa suite. Par le prince, le comte, le directeur des greniers d'Amon, le maire de la Ville du Sud, Sennefer, juste de voix".
- Le texte qui a trait à Amenemopet dit : "Le prince, le comte, le chancelier du roi de Basse Égypte, l'ami unique, conseiller de son seigneur, l'honoré par le roi dans son palais, l'immuable en faveurs et ferme dans l'affection, le possesseur de grâces dans le palais, celui qui entre tranquillement et sort avec calme, qui a atteint les limites de l'excellence et de l'intégrité, le directeur de la cité, le vizir, le directeur des six grands châteaux, Amenemopet, juste de voix, engendré par l'intendant du domaine de la divine épouse (Ahmes) Houmay, et né de la maîtresse de maison Noub".
La femme d'Amenemopet est désignée comme : "Son épouse, son aimée, la favorite royale et maîtresse de maison, Ouretmaatef, juste de voix, imakhou (t) ".

3) - Mur nord

Il comporte trois scènes très différentes, avec Sennefer en observateur dans les scènes extérieures et acteur au centre.

A - Scène N°1, près de l'entrée : Sennefer observe les produits des prairies et des marais

La scène est divisée en deux registres. À gauche de chacune se trouve Sennefer assis sur un tabouret dans un pavillon constitué de colonnettes bleues, d'un toit et dont le sol est recouvert d'une épaisse natte. Il tient en main un sceptre de puissance et sa canne de fonction. Le texte du bas, le plus lisible, dit : "Regarder les prairies, traverser les marais et organiser les affaires aux Chemins d'Horus. Par le maire de la Ville du Sud, Sennefer, juste de voix".
Les chemins d'Horus désignent un groupe de fortifications qui se trouvent à la frontière nord-est, après la zone dite des lacs amers. Il s'agissait de la ligne de protection contre les envahisseurs asiatiques. On reste perplexe devant cette allusion car, à priori, aucune des fonctions du maire de Thèbes ne peut avoir un rapport quelconque avec cette frontière lointaine.
Devant chacune des représentations de Sennefer, le registre se subdivise en deux sous-registres. Sur chacun se trouve une pile d'offrandes apportées par des porteurs. Un scribe en dresse l'inventaire.

B- Scène N°2 (au centre) : chasse et pêche dans les marais

La scène est centrée par un bosquet de papyrus duquel s'envole une nuée d'oiseaux, tandis que l'eau au pied est riche en poissons. À gauche, Sennefer lance son bâton de jet sur les volatiles, et en agrippe déjà un, tandis qu'à droite il va harponner un (ou deux) poisson (s). Le défunt se tient dans la position canonique -et irréaliste- pour ces deux actions, vêtu de ses beaux atours, debout sur un minuscule esquif instable.
Il est accompagné de son épouse Senetnay qui se tient derrière lui, en taille réduite. Une représentation encore plus petite de son petit fils se trouve derrière Senetnay sur la scène de pêche (voyez la petite image de droite, et appréciez aussi le travail de nettoyage). Seul un bras du petit garçon est encore visible devant Sennefer dans la scène de chasse.
Les textes d'accompagnement décrivent la scène et se terminent par quelques titres du défunt :

 : "Traverser les roselières et les étangs giboyeux, se divertir à harponner les poissons dans les marais, par le bien aimé de la déesse des marécages, le prince, le comte, le courtisan bien aimé, le maire de la Ville du Sud, directeur des greniers d'Amon, directeur des terres arables d'Amon, Sennefer, juste de voix."

"Se réjouir, contempler de belles choses, contempler les marais, agir comme si on était un chasseur. Par le bien-aimé de la déesse des marais et compagnon du seigneur de la capture des oiseaux. Par le prince, le comte, le confident excellent du seigneur des Deux Terres, le loué du dieu bon, le maire de la Ville du Sud, le directeur des greniers d'Amon, le directeur des prophètes d'Horus, seigneur de Qous, Sennefer, juste de voix".

Nous avons déjà évoqué dans d'autres tombes la significatione éminemment symbolique de ces scènes qui, outre la représentation d'activités plaisantes, constituent un moyen de repousser les forces du chaos susceptibles de nuire au nouvel homme en cours de gestation, le tout agrementé d'allusions érotiques subtiles (comme le canard).

C - Scène N°3 : le banquet

Dans la scène qui termine ce mur, Sennefer et son épouse sont assis à gauche. Il observe son propre banquet funéraire, éternellement renouvelé par la puissance de la magie. Étrange banquet d'ailleurs, où personne ne mange.
Il s'agit de représenter la "Belle fête de la vallée" qui unit chaque année les vivants à leurs défunts, auxquels ils viennent rendre visite et faire des offrandes, ainsi que prendre un repas.
Le texte dit : "Se réjouir, contempler de belles choses et recevoir les cadeaux qui sont donnés en présence (du dieu), provenant des offrandes du seigneur des dieux, Amon, seigneur des trônes des Deux Terres. Par le prince, le comte, le courtisan bien aimé, l'excellent confident du seigneur de Double Pays, le loué du dieu bon, le maire de la Ville du Sud, le directeur des greniers d'Amon et directeur des terres arables d'Amon, Sennefer, juste de voix (et) son épouse, la maîtresse de maison et nourrice royale, Senetnay, [juste de voix]".

Selon la mode encore archaïsante de l'époque, les convives anonymes sont représentés presque identiques, les femmes d'un côté, les hommes de l'autre, l'ensemble étant encore dépourvu des 'fantaisies' que l'on trouvera plus tard. L'artiste a insisté sur les différences de carnation (jaune clair pour les femmes, brun pour les hommes), mais déjà des changements se profilent, et dans la salle hypostyle, hommes et femmes auront la même couleur de peau.

On remarque que certaines zones du mur nord ont été laissées inachevées et on retrouve sur le plâtre les marques rouges du quadrillage de mise à l'échelle des personnages (voir image de droite). Chaque cadrat mesure deux doigts (3,75 cm) selon le système de mesure de l'époque. On retrouve ce quadrillage dans d'autres endroits de la sépulture.

À la différence de celles des convives, les images de Sennefer et de son épouse ont été très détaillées, et sont d'une qualité qui traduit le travail d'un maître. Non seulement ils ont été peints en détail, mais certaines parties, comme les perruques et colliers, ont également bénéficié de rajouts de mortier qui, après séchage, a été délicatement sculpté pour créer les frisettes et les perles. On remarque aussi le bracelet que porte Sennefer, qui présente un aspect ajouré avec une alternance de signes ankh et de piliers djed dont les couleurs jaune et bleues évoquent l'or et le lapis-lazuli. La poitrine de Sennefer est couverte d'une tunique transparente, donnant à la chair une couleur rosée, surmontée d'une autre dont le froncement a été rendu par des lignes rouges ondulantes, et dont les bords sont ornés d'une délicate dentelle.
Senetnay porte une robe fourreau blanche à une bretelle qui laisse –conventionnellement- le sein exposé. Les époux ont chacun autour du cou un large collier où domine la teinte bleue, et qui a bénéficié du travail en relief dont nous avons parlé. Le double cœur que Sennefer porte en pendentif est bien visible.

4) - Le plafond

Comme dans la salle précédente, le plafond comporte trois larges bandes qui courent sur toute la longueur, avec entre elles un motif géométrique.
Le texte comporte à nouveau la litanie des titres du défunt, mais aussi une autobiographie, que voici :
"Le courtisan bien aimé, le grand parmi les grands, le noble dignitaire parmi les courtisans du Seigneur du Double Pays, il dit : 'J'ai atteint le stade de vénérable à un âge avancé pendant le règne du roi, car j'étais le confident du seigneur des Deux Terres. Le roi connaissait mon excellence, et il savait que je faisais des choses utiles dans le cadre des positions où il m'avait placé. Il a enquêté partout, mais n'a rien pu trouver de mauvais sur mon compte. J'étais loué à cause de cela et tous mes besoins étaient satisfaits. Il me nomma administrateur en chef et directeur de la Ville du Sud, directeur des greniers d'Amon, directeur des champs d'Amon, directeur des jardins d'Amon, grand prêtre d'Amon dans le temple Men-isout (le temple funéraire de la reine Ahmes-Nefertari) '. Le maire Sennefer, juste de voix auprès du grand dieu".