LE COMPLEXE FUNÉRAIRE SOUTERRAIN

Il est formé de deux pièces seulement qui, bien qu'accessibles au public aujourd'hui, ont été dans l'antiquité fermées et scellées après l'enterrement.
L'accès se fait par une descenderie qui s'ouvre dans la cour, par l'intermédiaire d'un escalier courbe. Celui-ci débouche sur l'antichambre qui communique par un court passage avec la chambre funéraire.
Les deux pièces ont une forme irrégulière et sont placées selon un axe très inhabituel sud-ouest / nord-est.
Les parois sont aujourd'hui protégées par des vitres, ce qui est une bonne chose, mais qui, hélas, ne permet plus de goûter aussi bien qu'avant tout le charme du monument ().
Dans la description qui suit, nous adopterons, comme les anciens, l'orientation symbolique et religieuse, en convenant que l'entrée se trouve à l'est et que le mur du fond représente l'ouest.
Les plafonds sont très irréguliers. Plutôt que d'essayer de les aplanir, un décorateur de génie a eu l'idée de se servir de cette situation. Ils ont été finement plâtrés après avoir été aplanis légèrement et peints. Et c'est au niveau de l'antichambre, ainsi que dans une partie de la chambre funéraire, que l'on trouve la fameuse vigne dont les feuilles et les pampres semblent tomber du plafond, et qui à fait donner à la sépulture le nom de "Tombe aux vignes".
Et on peut ici parler de miracle, puisque les caveaux sont très rarement peints à cette époque, or celui-ci l'est de façon magnifique et il a survécu au passage des siècles.

La descenderie

Son entrée se trouve du côté gauche de la cour. Un escalier courbe de 44 marches grossièrement taillées dans une galerie basse de plafond amène le visiteur à 12m sous terre.
En constatant qu'il n'y fait pas plus frais qu'en surface, il aura peut-être une pensée pour les hommes qui ont travaillé ici, à la lueur tremblotante de quelques lampes à huile, et sans système de renouvellement de l'air.
La porte de bois qui fermait l'entrée a disparu, et on pénètre directement dans l'antichambre où commence la décoration qui était destinée au défunt et à lui seul.

L'antichambre

La pièce est grossièrement rectangulaire, avec des coins arrondis. Elle mesure 3,50 × 2,50 × 1,80m.

Le sommet des murs constitue une prolongation du plafond, duquel feuilles et grappes semblent pendre jusqu'au niveau de la frise égyptienne dont les rectangles de couleur bordent les parois en haut et latéralement jusqu'à l'extrémité ouest des murs nord et sud. Cette bande est nettement abaissée dans l'angle nord-ouest, avec une augmentation proportionnelle de la hauteur de la vigne et du plafond. À la partie basse des parois, nous retrouvons une large ligne rouge cernée de noir, tandis que le bandeau qui s'étend en dessous de celle-ci jusqu'au sol est blanc.

1) - Le plafond

Des sarments de vignes courent le long des irrégularités du plafond. Feuilles larges et grappes généreuses y sont rattachées. L'ensemble a un aspect ondulant et vivant, et se prolonge sur le haut des murs.
La vigne est étroitement associée avec Osiris, "seigneur de l'ivresse au cours de la fête ouag", célébrée au moment de la vendange. Nous retrouverons d'ailleurs dans la pièce suivante de la vigne accrochée au kiosque sous lequel est assis le grand dieu. Et il s'agit aussi d'évoquer l'importance de la fonction de directeur des jardins d'Amon exercée par le défunt.

2) - Mur nord (droit)

(voir de Virey)

Quand on regarde sur la droite immédiatement après être entré dans la pièce, on trouve deux images de Sennefer dos à dos, dont l'une est sévèrement mutilée. Elles font face aux deux processions (de deux registres chacune) de porteurs d'offrandes qui s'éloignent d'elles.
Le texte résiduel proclame : "Entrer en paix dans la nécropole, après avoir atteint un grand âge, rejoindre les favorisés d'Amon-Ra, en paix, en paix, le maire de la Ville du Sud, Sennefer, juste de voix".
Sennefer tient sa canne de fonction de la main droite, et une pièce de tissu est serrée dans la gauche (). Autour du cou s'étale un large collier qui masque partiellement le pendentif aux deux cœurs dont nous avons déjà parlé. Des bracelets d'or enserrent ses poignets et ses bras. Il est vêtu simplement d'un pagne, recouvert d'une tunique blanche plus longue, presque transparente. Il est coiffé d'une perruque et il porte la courte barbe taillée des fonctionnaires défunts, que l'on retrouvera partout dans la pièce.

Les deux rangs de la procession évoquée ci-dessus se dirigent vers une autre représentation du défunt, assis à l'extrémité ouest (gauche) du mur nord sur un siège à haut dosseret ().

Il porte encore le pagne blanc, mais complété cette fois par une tunique qui recouvre aussi la poitrine et la partie haute des bras. Des bracelets enserrent ses bras, mais il n'a rien aux poignets. Un large collier d'or s'étale autour de son cou, mais l'artiste a choisi d'exagérer la taille du pendentif aux deux cœurs, afin de souligner son importance. Les coeurs ont été laissés blancs, sans doute un oubli. Le défunt tient dans sa main gauche sa canne de fonction, et dans la droite un grand sceptre Sekhem de consécration.
Le texte au-dessus de lui dit : "Une offrande que fait le roi à Amon-Ra, le seigneur du trône des Deux Terres, à Osiris, le dieu grand, seigneur de l'éternité, à Anubis, à Imyout, le seigneur de Ta-djeser Qu'ils accordent la sortie et l'entrée par la porte de Rosetaou au Ka du favori du dieu beau (au ka du) maire de la Ville du Sud, Sennefer, juste de voix". Imyout (litt : (celui qui est) dans ses bandelettes) désigne le dieu de la momification. Il n'est habituellement pas représenté en tant que tel, mais par l'entremise de son fétiche, qui était utilisé lors de la momification et qui devait avoir un rapport avec les bandelettes dont on entourait le cadavre. Ro-setaou désigne à l'origine la nécropole memphite puis, plus tard, un endroit particulier de la nécropole en général. Ta-djeser (la terre sacrée) fait référence à LA nécropole, celle d'Abydos.

a) - Derrière Sennefer

"Sa fille, qu'il aime, la chanteuse d'Amon, Mouttouy" se tient debout, vêtue d'une robe blanche collante à bretelles. Elle l'entoure de ses bras, sa main gauche posée sur l'épaule gauche, tandis que sa main droite lui enserre le bras droit.

b) - Registre supérieur devant Sennefer

Sur une petite table basse sont déjà posés un collier et deux bracelets. Les porteurs qui approchent sont anonymes. Le petit texte au-dessus du second dit simplement "Le maire Sennefer". Ils apportent deux colliers, une paire de sandales, deux statuettes funéraires, une pièce de tissu, un masque de momie en cartonnage et un vase en forme de cœur, deux coffres et un panier ().
Cinq colonnes de texte commencent dans le coin nord-est et se poursuivent sur le mur est, au niveau des deux porteurs de coffres : "Suivre toutes les bonnes choses dans la tombe, comme il est fait pour le premier des amis, le maire de la Ville du Sud, celui qui est favorisé par le dieu bon (= le roi), Sennefer, le favori d'Amon, le maire qui a exercé ses talents, enterré auprès des favorisés".

c) - Registre inférieur devant Sennefer

Au sein d'une grosse pile d'offrandes on aperçoit des légumes, des paniers de raisin, la cuisse d'un bœuf et des vases. On ne le voit plus aujourd'hui, mais grâce aux dessins de Virey, on sait qu'un prêtre consacrait ces offrandes. Viennent ensuite deux hommes qui apportent différents types de vases. Il y avait dans le coin derrière eux un texte qui était déjà perdu du temps de Virey. Puis, sur le mur est, nous trouvons deux hommes qui transportent un lit.

3) - Mur sud (gauche)

(voir le de Virey)

La scène qui jouxte l'entrée est endommagée, et un grand fragment de paroi devant Sennefer est également absent.
Le défunt est assis sur un siège à dosseret bas, tourné vers la gauche. Il est habillé comme à l'accoutumée, mais on remarque la couleur réellement rose pâle que l'artiste a donnée à la chair sous la tunique. Il tient de la main droite un sceptre Sekhem, tandis que la gauche est étendue paume vers le sol, indiquant la prise de possession des offrandes ou du cadeau. Cette fois il conserve son collier, mais n'a plus son pendentif aux deux cœurs.

Dans la lacune se tenait "Sa fille, qu'il aime, qui est assise dans la place de son cœur, Mouttouy", qui lui offrait deux colliers, dont seul persiste celui qui est constitué de perles de couleur, auquel est suspendue une amulette bleue (lapis lazuli ?) en forme de cœur ().
Au-dessus du défunt se trouve ce texte : "Le prince, le comte, constant en faveurs, bien aimé, le maire de la Ville du Sud, directeur des greniers d'Amon, directeur du bétail d'Amon, Sennefer, juste de voix".

Les deux registres derrière Mouttouy montrent de nombreux porteurs d'offrandes qui, à la différence de la scène correspondante sur le mur d'en face, sont ici identifiés comme des prêtres (). Les cinq du haut portent "Des pains purs d'Amon de Karnak, d'Atoum, d'Osiris, d'Anubis, d'Hathor, pour le Ka de Sennefer". Dans le registre du dessous, ils amènent des présents utiles à la régénération du défunt dans l'au-delà, notamment des tiges de palmiers qui symbolisent le renouveau de la vie dans la nature, des linges qui symbolisent la terre qui enveloppe et fait germer les semences, un cuisseau avant droit, qui symbolise la puissance régénératrice. Grâce à Virey, on sait que le troisième prêtre-sem faisait une fumigation d'une main et une libation de l'autre sur un petit autel posé devant lui. Il est possible que le cinquième ait porté un cœur, qui doit être offert au régénéré.

4) - Mur Ouest

Il est percé par l'entrée vers la chambre suivante, lieu de passage entre les mondes. La porte qui la fermait a disparu depuis longtemps. La montre l'aspect actuel, avec les glaces.
De chaque côté, Sennefer a fait placer des scènes d'adoration où il est représenté debout, bras levés, accompagnée de son épouse. Ici, elle est nommée Senetneferet, et joue le rôle de la déesse Hathor qui doit stimuler à nouveau la sexualité de son époux, afin qu'il puisse renaître de ses propres œuvres.
Le décor qui se trouvait au-dessus de l'entrée avait déjà disparu du temps de Virey, mais il est certain, grâce aux comparaisons et aux textes restants, qu'il comportait deux dieux, sans doute assis dos à dos, avec une symétrie axiale. Du côté droit, le texte nomme Osiris d'Abydos en rapport avec le soleil levant à l'est, et du côté gauche devait se trouver encore Osiris, où Anubis.

Du côté droit
Sennefer invoque Osiris, tandis que Senetneferet agite d'une main le sistre hathorique, dont le bruit de crécelle, qui rappelle celui des papyrus froissés, doit faire apparaître la vache divine ; son autre main est levée et, à la saignée du coude pend un lourd collier Menat, autre symbole hathorique (). Devant elle est placée une table avec des offrandes et une grande fleur épanouie entre deux boutons.
Derrière elle se trouve une chaise à dossier relevé, vide. Il s'agit d'un important symbole : le défunt a 'secoué ses membres', s'est 'redressé' (comme on le lira quelques décennies plus tard dans le Livre des Morts). Il a secoué sa torpeur, sa fatigue (Osiris, dont on ne dit jamais qu'il est mort, est 'le fatigué de cœur').
Le texte dit : "[Salut à toi, Ô toi le dieu auguste, Osiris, maître de Ro-setaou] grand dans Abydos, le souverain qui règne éternellement ! Viens contempler les splendeurs de l'étoile qui se lève (= le soleil) durant le cours de chaque jour [dit] le maire Sennefer, juste de voix, et la maîtresse de maison, la dame Sen (et) nefer (et), justifiée." Le nom de l'épouse a été écrit Sennefer, très probablement une erreur du scribe.

Du côté gauche
Nous retrouvons le défunt et son épouse qui tient une Menat à la main () tandis que de l'autre, elle agite le sistre. Le texte dit cette fois : "[il] fait [adoration à…], le directeur des greniers d'Amon, le directeur des troupeaux d'Amon, le directeur de jardins d'Amon, celui qui satisfait le cœur de son maître, par lequel il est grand dans la ville, Sennefer, juste de voix. Sa compagne, qu'il aime, la maîtresse de maison, la chanteuse d'Amon, Senetnefer (et), juste de voix". L'erreur sur le nom de la dame est cette fois limitée au "t" final, signe du féminin.

Le passage

Il ne mesure que 1,35m de haut et 1,20m de large. Pour une raison absolument incompréhensible pour nous, des fragments de grès déjà gravés, venant certainement de la façade, ont été intégrés, sans aucune nécessité apparente.

1) - Plafond

( et ) Il comporte un de ces blocs décorés qui occupe presque la moitié de la surface du côté ouest. Il porte la tête de Senneferet d'une femme (épouse ou fille), avec plusieurs colonnes de texte : "Le maire de la Ville du Sud, Directeur des greniers d'Amon, directeurs des champs d'Amon, directeur des jardins d'Amon, directeur du bétail d'Amon".

2) - Côté gauche (sud)

Deux blocs occupent environ la moitié de la surface. Le premier n'atteint pas le plafond. Il s'agit de la base de trois colonnes verticales de texte où sont répertoriées des offrandes destinées au maire, ainsi qu'à "la nourrice royale".
Le second bloc ressemble à celui du plafond, avec deux têtes ; il a été placé verticalement, et non à horizontale et on devine encore les restes d'une frise de khakherous. Il pourrait donc venir de la chapelle.
Le texte restant dit : "…qui le guide de jour comme de nuit, qui ne se lasse pas de ce qui a été placé au-dessus de lui, à qui les deux cœurs d'argent et d'or ont été placés autour du cou en présence de tout le pays, le maire de la Ville du Sud, le directeur des greniers d'Amon, Sennefer, juste de voix."

3) - Côté droit (nord)

Il est lui aussi constitué de deux blocs qui couvrent environ la moitié de la surface. Celui de droite n'atteint pas le plafond. Il est placé dans le mauvais sens, son sommet pointant vers l'antichambre. Il porte les restes de Sennefer debout devant une pile d'offrandes au-dessus de laquelle se trouve une fleur de lotus. Le petit texte évoque "Le maire de la ville du Sud, directeur des greniers d'Amon".
L'autre bloc, inséré tête en bas, occupe toute la hauteur et consiste en deux colonnes de texte ; l'une finit par "Le maire de la Ville du Sud, directeur des greniers d'Amon" et l'autre par "…vin et bière pour la vigueur du ka de la nourrice sèche du roi".